COLOMBIE
Manifestation de paix:
2 ans des négociations en Colombie
Constance Leon
22 novembre 2014
Ce mercredi, la Colombie fêtait l’anniversaire des deux ans des négociations de paix, délocalisées à La Havanne. En octobre 2012, le successeur à la présidence de la République du radical Alvaro Uribe, Juan Manuel Santos, initiait un processus de pacification avec les FARC, la guérilla marxiste, composée de 8 000 membres.
Au cœur de Bogotá, sur la place San Martin, le général éponyme, libérateur du Chili et du Pérou, observe les quelque 300 manifestants, de toute sa majesté. La mairie de Bogotá organise la marche citoyenne pour la paix, rappelant qu’elle est aux mains de ses citoyens et pas seulement dans un bureau de Cuba. Avant-hier, un général de l’armée régulière et trois de ses collaborateurs ont été enlevés par les FARC, interrompant brusquement les négociations.
Piedad Cordoba, une ancienne sénatrice de gauche radiée de l’Assemblée, pressentie pour Prix Nobel de 2009, éblouit les participants par sa confiance. Les militants de son parti, la Marche Patriotique, l’entoure, arborant des drapeaux blancs.
En Colombie, « pas de justice, pas de paix »
Pourra-t-on mettre fin au conflit armé sans entendre les revendications qui lui ont donné naissance, il y a plus de cinquante ans ?
par Maurice Lemoine
Seules quelques pirogues à moteur permettent d’atteindre Puerto Matilde et ses humbles habitations, au bord des eaux verdâtres du río Cimitarra. Dès que s’abat le crépuscule, le hameau s’estompe dans le noir, faute d’électricité. La nuit, une pluie torrentielle bombarde les toits de tôle ondulée. A 8 heures du matin, diluant les derniers nuages, le soleil cogne déjà. Toute l’eau qui s’évapore engraisse l’air. On transpire avant même d’avoir posé un pied sur les planches glissantes qui, jetées au-dessus de la boue, permettent les déplacements. Tout en cheminant vers le poste de santé dépourvu de médecin, d’infirmière et même du moindre médicament, le président du comité d’action communale Carlos Enrique Martínez fait ce constat évident : « Comme tant d’autres zones de Colombie, cette région du Magdalena Medio vit marginalisée, dans le plus total dénuement. »
COLOMBIE
Alberto Castilla,
premier sénateur colombien d'origine paysanne :
« La paix signifie réforme agraire »
Le sénateur du Pôle Démocratique Alternatif Alberto Castilla parle des défis à relever par les organisations sociales rurales, remet en cause le modèle économique de l'agro-négoce et donne son opinion sur les négociations de paix entre le Gouvernement et la guerrilla des FARC.
(Interview exclusive de Nodal)
par Cecilia Escudero
Avril 2015
Au sein de l'élite politique colombienne, le sénateur Alberto Castilla fait entendre une voix différente, en provenance des profondeurs de l'intérieur du pays. Sur la base d'une longue trajectoire de dirigeant communautaire[1], qui le conduisit à être l'un des leaders de la grève agraire de 2013, Castilla est devenu le premier législateur d'origine paysanne, bien qu'il affirme lui-même « en Colombie la politique se fait avec de l'argent et avec le nom de familles traditionnelles ». En entrevue avec Nodal, ce congressiste qui affronta la violence paramilitaire et les déplacements forcés dans la région du Catatumbo, au Nord du Santander[2] pointe du doigt le modèle de développement du pays et explique pourquoi la paix en Colombie va au delà de la signature des accords pour une sortie politique du conflit armé. Mais aussi, en tant que représentant colombien au sein de la Confédération Latinoaméricaine des Organisations de la Campagne (CLOC – Via Campesina), Castilla détaille les principaux points de l'agenda des organisations sociales de la région, dont émergent la demande d'une réforme agraire, la reconnaissance du paysan comme sujet politique et le respect de la nature.
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[1] NdT au sens de dirigeant des communautés rurales – rien à voir avec le communautarisme
[2] Département au Nord-Est de la Colombie, dans la région andine